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[COURS] L’infans conceptus : définition, conditions, effets


La notion d'infans conceptus, tirée de l'adage latin « infans conceptus pro nato habetur quoties de comodo ejus agitur » implique que « l'enfant conçu sera considéré comme né chaque fois qu'il pourra en tirer avantage ». En principe, l'embryon et le foetus n'ont pas la personnalité juridique, car ils sont considérés comme ni vivants ni viables. En revanche, par exception et sous certaines conditions, ils pouront bénéficier de cette personnalité juridique. Définition, conditions, effets et débats doctrinaux, découvrez un article de cours complet ! 🍊

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Sommaire :

 

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Infans conceptus* est un adage du droit romain qui signifie que l’enfant conçu est considéré comme né si cela lui apporte un avantage présent dans les articles 311, 725 et 906 du Code civil.


Pour en bénéficier, 3 conditions doivent être remplies :


  1. ✅ Existence de l’enfant conçu ;

  2. ✅ L’intérêt propre de l’enfant ;

  3. ✅ Naissance ultérieure d’un enfant viable.


Pour commencer, il est important de bien comprendre la règle initiale : l’absence de personnalité juridique de l'embryon.

Bon à savoir : *cette notion fait partie du cours de droit des personnes, généralement étudié en première année de droit. Pour t'aider à réussir cette matière, nos enseignants ont rédigé des fiches en droit des personnes, optimisées pour la mémorisation !

En effet, la personnalité juridique naît au même moment que la personne physique, si cette dernière est vivante et viable. Pour rappel, cette personnalité confère à celui qui en jouit l'aptitude à être titulaire de droits (mais elle le soumet aussi à des obligations). [Ndlr : voir une dissertation corrigée sur les non sujets de droit et la place de l'infans conceptus].


Le cas de l'embryon est plus complexe, car il est difficile de le qualifier. Le Comité consultatif national d'éthique le définit comme une « personne humaine potentielle » mais son statut juridique reste flou.


Il n’est pas vraiment considéré comme une personne juridique mais plutôt comme une chose. D'ailleurs, le législateur a volontairement décidé de ne pas parler de « personne » mais bien « d'être vivant » à l'article 16 du Code civil !


Cette absence de reconnaissance de la personnalité juridique à un fœtus/embryon a été illustrée par un arrêt de l’assemblée plénière de la Cour de cassation du 29 juin 2001 (Cass., ass. plén., 29 juin 2001, n° 99-85.973).


Pour résumer, il s’agissait d’un accident de la route durant lequel une femme enceinte a perdu son enfant à naître. La femme considérait que le foetus perdu avait été victime d'un homicide.


Ce qu'il faut retenir, c'est que la Cour a décidé que le fœtus ne pouvait être considéré comme victime d’un homicide involontaire, parce qu’il ne s’agissait pas d'une personne, étant né prématurément des suites de l’accident, sans donner aucun signe de vie.


La Cour a alors appliqué strictement la loi pénale, et plus spécifiquement, l’article 221-6 du Code pénal.


La CEDH, quant à elle, s'est également vue réticente à protéger le foetus, en ne le reconnaissant pas comme une personne (CEDH, 8 juillet 2004, Vo contre France, Req. n°53924/00).

💡 Le saviez-vous ? L'embryon est le terme scientique pour désigner le futur enfant jusqu'à la 10e semaine d'aménorhée. C'est seulement après qu'on parle du fœtus !

La solution de principe semble parfois excessivement rigoureuse. Pour autant, il existe une exception à cette absence de personnalité juridique : l'infans conceptus.


Pour vous aider à bien assimiler cette notion et à briller en TD, retenez bien la définition qui va suivre ainsi que les conditions et effets de cet adage !


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Définition du principe infans conceptus dans le temps et dans la loi


« Infans conceptus pro nato habetur quoties de commodis ejus agitur »


Quelle est la signification de l'infans conceptus ?


La traduction de cet adage d'infans conceptus est : « l’enfant simplement conçu est considéré né chaque fois qu’il peut en tirer un avantage. » Il s’agit d'un adage connu depuis le droit romain.


L’origine de ce principe est de ce fait ancien et reconnu par Jean Domat, un juriste français du XVIIᵉ siècle. Ce dernier, lors de l’Ancien Droit, expose que si l’on espère que l’enfant naît vivant, « on leur conserve les successions échues avant leur naissance. »


Ce principe de l’infans conceptus existe donc depuis un certain moment… Et a persisté dans le temps !


Le Code civil évoque par ailleurs l’enfant présumé conçu, notamment aux articles : 311, 725 et 906.


L'infans conceptus dans le Code civil


Les articles qui mentionnent l'infans conceptus dans le Code civil sont : l'article 311, l'article 725 et l'article 906 du Code civil.


Article 311 du Code civil : « La loi présume que l'enfant a été conçu pendant la période qui s'étend du trois centièmes au cent quatre-vingtième jour, inclusivement, avant la date de la naissance. La conception est présumée avoir eu lieu à un moment quelconque de cette période, suivant ce qui est demandé dans l'intérêt de l'enfant. La preuve contraire est recevable pour combattre ces présomptions. »


Article 725 du Code civil : « Pour succéder, il faut exister à l'instant de l'ouverture de la succession ou, ayant déjà été conçu, naître viable. Peut succéder celui dont l'absence est présumée selon l'article 112. » (Modifié par la loi du 3 décembre 2001, qui a ajouté l’alinéa 1.)


Article 906 du Code civil : « Pour être capable de recevoir entre vifs, il suffit d'être conçu au moment de la donation. Pour être capable de recevoir par testament, il suffit d'être conçu à l'époque du décès du testateur. Néanmoins, la donation ou le testament n'auront leur effet qu'autant que l'enfant sera né viable. »


Un principe général du droit


Le principe d'infans conceptus est d’ailleurs un PGD (principe général du droit) qui a été reconnu par un arrêt de la Cour de cassation du 10 décembre 1985 (n° de pourvoi : 84-14328).


Un principe de valeur constitutionnelle


Le principe d'infans conceptus est reconnu par certains comme ayant une valeur constitutionnelle. En effet, François Luchaire dans un de ses articles de 1982, commente la décision du Conseil constitutionnel du 15/01/1975 n°74-54 DC et reconnaît donc cette valeur.


Ainsi, un embryon, s’il naît vivant et viable, et que cela est dans son intérêt, se verra attribuer une personnalité juridique.


Après avoir bien vu la signification et la définition même de l’infans conceptus, nous allons maintenant voir plus en détail les conditions !


 
 

Conditions pour profiter de l’application du principe infans conceptus


Il existe 3 conditions à l’adage infans conceptus :


  • 1️⃣ L’existence d’un enfant conçu ;

  • 2️⃣ L’intérêt propre de l’enfant ;

  • 3️⃣ La naissance ultérieure d’un enfant viable.

Condition 1 : L’existence d’un enfant conçu

La première condition de l'infans conceptus concerne l’estimation de la date de conception de l’enfant, soit un enfant qui a été conçu. Cette conception doit être au plus tard effectuée au moment où l'existence du droit est reconnue (art. 311, 725 al. 1 et 906 al. 1 et 2 du Code civil).

Par exemple : au moment du décès du « de cujus ». En effet, un enfant conçu postérieurement ne pourra pas obtenir succession.

Il existe alors une certaine détermination de la conception qui se doit d’être entre le 300ᵉ et 180ᵉ jour avant la date de la naissance de l’enfant (art. 311 Code civil).


Seulement, ce minimum et maximum ont été considérés illégitimes par l’arrêt de la Cour de cassation du 9 juin 1959 (n° de pourvoi : 58-10.038).


Avant, il n'était pas possible de donner une preuve contraire. Depuis, la loi n° 72-3 du 3 janvier 1972 a transféré à l’article 311 du Code civil l’existence d’une présomption simple, afin d’apporter une preuve contraire à la détermination de la conception.


On parle alors de présomption dite omni meliore momento (au moment le plus favorable). L’enfant ne se verra pas pénalisé s'il est conçu le 301ᵉ jour avant sa naissance et que la succession n'a été ouverte qu’après.


Condition 2 : L’intérêt de l’enfant


La seconde condition de l'infans conceptus concerne le fait que l’enfant, pour qu’il soit considéré comme né, doit y trouver un intérêt. Cet intérêt doit lui être propre et non pas pour celui de ses parents.

Voici différents exemples pour expliquer cette condition :


  • Le père décède, l’héritage a plus de dettes que de crédits. La règle ne va donc pas jouer ;

  • Avoir la qualité d’héritier​ (l’exemple de l’article 725 du Code civil) ;

  • La qualité de donataire ;

  • Pouvoir profiter de dommages et intérêts, lorsque par exemple, le père décède d’un accident de la circulation (TGI de Niort, 17 septembre 2012) ;

  • Bénéficier d’une assurance-vie.

Condition 3 : La naissance ultérieure d’un enfant viable

La dernière condition de l'infans conceptus est que l’enfant doit venir au monde vivant et viable. Il accède alors à la personnalité juridique qui rétroagit au jour de sa conception (art. 725 al. 3 et 906 al. 3 du Code civil).


En effet, il doit être né vitae habilis autrement dit, physiologiquement capable de survivre.


  • S’agissant de définir ce qui est sous-entendu par la viabilité, Gérard Cornu l’a défini ainsi : « une présomption de viabilité s’attache au premier signe de vie » ;

  • L’enfant doit donc respirer et ne doit avoir aucun souci de santé qui pourrait rendre sa mort inévitable. Dans le cas inverse, l’infans conceptus ne pourra être appliqué.


Ainsi, après avoir bien vu les différentes conditions essentielles à l’application de l’infans conceptus, il est primordial de voir les effets de ce dernier ainsi que quelques exemples d’applications du principe !



Les effets du principe de l'infans conceptus


Les effets du principe infans conceptus sont : que l’enfant sera réputé vivant à la date à laquelle s’ouvrent les droits s’il naît viable. Cependant, il ne pourra pas recevoir d’obligations, car cette personnalité juridique partielle ne doit être que dans l’intérêt de l’enfant à naître !


Ce principe Infans conceptus est notamment rejeté ou confirmé par des décisions, qui permettent de mieux comprendre sa possible application !


Arrêts de principe sur l’absence de personnalité juridique

Il existe des arrêts de principe sur l'absence de la personnalité juridique qui sont :


▶️ Cass. 1re civ., 10 décembre 1985, n° 84-14.328 (au tout début de l’article). Les faits : accident de la route, à l’issu duquel une femme enceinte a perdu son enfant à naître. La Cour indique que le fœtus ne pouvait être considéré comme victime d’un homicide involontaire, car il ne s’agissait pas d'une personne, étant né prématurément des suites de l’accident, sans donner aucun signe de vie. ▶️ Cass. ch. crim., 30 juin 1999, n° 97-82.351.


La Cour de cassation a statué une nouvelle fois en défaveur d’une reconnaissance de personnalité juridique d’un enfant.

L’application de l’infans conceptus avec la réparation du préjudice moral ou d’affection


Il existe des arrêts ou il y a l'application de l'infans conceptus avec la réparation du préjudice moral ou d'affection :


▶️ Cass. 2e civ., 14 décembre 2017, n° 16-26.687. Les faits : il s’agissait d’un accident de travail mortel d’un père de famille. Sa femme, demande réparation du préjudice pour elle et ses enfants, dont l’un n’était pas encore né lors de l’accident. La Cour de cassation reconnaît le principe infans conceptus. Elle considère que l’enfant qui n’était pas encore né lors de l’accident mortel de son père est en droit d’avoir réparation du préjudice moral. En effet, il subira l’absence définitive de son père.

▶️ Cass. ch. crim., 10 novembre 2020, n° 19-87.136. Cet arrêt est dans le même esprit que l’arrêt de 2017. Les faits : en l’espèce, un père de famille est victime d’un accident de la route mortel. Le coupable était sous l’emprise de l’alcool et a commis un excès de vitesse. L’homicide involontaire est ainsi reconnu.

Sa compagne demande réparation du préjudice moral pour elle et pour son fils, né quelques semaines après l’accident. L’enfant ayant été conçu avant l’accident, ce dernier obtiendra finalement réparation.

Exemples parlant de l'application du principe juridique


Il y a des exemples sur l'application de ce principe pour mieux comprendre.

Exemple n° 1 : suite au naufrage du Titanic, un milliardaire, John Jacob Astor IV, est décédé (dans le film Titanic de James Cameron, c'est Éric Braeden qui interprète John Aston IV !). En effet, il a laissé sa femme enceinte embarquer dans un canot de sauvetage, sans que lui puisse y monter.


L’enfant, John Jacob Astor VI, naît en août 1912, 4 mois après la mort de son père. Il héritera* de ce dernier grâce à l’application de l’infans conceptus !


*Bon, il touchera une belle somme (même somme que sa sœur aînée) mais pas autant que son frère aîné Vincent Astor qui obtiendra l’équivalent de 2,2 milliards de dollars aujourd’hui !

Exemple n° 2 : on a aussi Jean Ier de France le Posthume, qui a hérité du trône alors qu'il n'était pas encore né.


En effet, son père, Louis Ier, est décédé pendant que sa femme était enceinte de Jean Ier. Il y a ainsi eu application de l’infans conceptus !


(Même si finalement, il n’a jamais été couronné, car n’a vécu que 5 jours…).

Pour compléter tout ce que l’on a vu, il est important de voir qu’il existe des débats doctrinaux vis-à-vis du principe. En effet, reconnaître l’existence d’une personnalité juridique au fœtus remet en cause l’avortement…



Débats doctrinaux sur le principe infans conceptus


Le principe de l'infans conceptus permet l’acquisition de droits pour le futur enfant né vivant et viable. Que ce soit avec une possible succession, pour acquérir la qualité d’héritier, ou encore pour obtenir réparation d’un préjudice. MAIS, il existe toujours une forme d’incertitude vis-à-vis de l’embryon.


L'embryon doit être considéré comme une personne


En effet, certains considèrent que l’embryon devrait être considéré comme une personne. C’est la position de certains courants de pensées moraux, philosophiques et religieux.


Ils s’appuient sur le fait que les scientifiques considèrent que toutes les composantes de l’être humain sont réunies dès la fécondation.


Ils s’appuient aussi sur des textes et droits fondamentaux dont le droit à la vie est affirmé. Notamment dans :


  • la Convention européenne des droits de l’Homme, à l’article 2

  • la Déclaration universelle des droits de l’Homme et du citoyen, à l’article 3

  • le Pacte des Nations unies à l'article 6.

Une considération en contradiction avec certains textes


Mais, le fait de considérer l'embryon comme une personne est juridiquement intenable, car inconciliable, avec plusieurs dispositions légales (notamment avec la loi Veil du 17 janvier 1975 qui autorise l’avortement, et plus précisément l’IVG [interruption volontaire de grossesse] les quatorze premières semaines).


Avant 2014, il fallait que la mère démontre sa détresse. Mais ce n’est plus un critère.


De plus, l’IMG (Interruption médicale de grossesse) est aussi légale en France, il s’agit d’interrompre la grossesse sans délai. L’IMG est appliqué dans ces deux cas :


  1. Lorsque la santé de la mère est en danger ;

  2. Et/ou lorsque le fœtus souffre d’une maladie grave et incurable.

Par exemple, les parents qui choisissent ou non de garder l’enfant en cas de Trisomie 21.

Ainsi, définir l’embryon reste complexe, car il détient en réalité une définition très différente selon la situation.


Cours de droit PDF : l'infans conceptus


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Article rédigé par une enseignante en droit,

avec la participation de Carla Gaillard, rédactrice juridique


 
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