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[DISSERTATION] Exemple : un écart irréductible de la Constitution ? (Droit constitutionnel)


Voici une dissertation de droit constitutionnel : « La Constitution et sa mise en pratique : un écart irréductible ? ». Une 1re partie traitera de la Constitution, une formalisation de l’esprit du constituant parfois difficile à respecter. Et une deuxième partie traitera du décalage opéré par la pratique, synonyme de la vie de la Constitution. 😉

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Sommaire :


 

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N.B.: Cette copie est le fruit de la réflexion d’un étudiant en droit. La découvrir vous permettra de comprendre le raisonnement de ce dernier, qui lui a valu la note indiquée. Elle vous aidera à ce que vous ayez les outils pour formuler votre propre réflexion autour du sujet donné. Pour rappel, le plagiat est formellement interdit et n’est évidemment pas recommandé si vous voulez vous former au droit. En d’autres termes, réfléchissez vous-même ! Enfin, cette copie n’a pas eu 20/20, gardez un œil critique sur ce travail qui n’est donc pas parfait.


Disclaimer : attention ! N’oubliez pas que selon les facultés et les enseignants, l’approche méthodologique peut varier. La méthodologie utilisée dans cette copie n'est donc pas universelle. Respectez la méthodologie enseignée par vos chargés de travaux dirigés et par vos enseignants 😊.



 

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[Accroche] « Une Constitution c’est un esprit, des institutions et une pratique ». C’est ainsi que le général de Gaulle concevait ce qu’est la Constitution, il incluait, lui, la pratique dans la définition d’une Constitution. [Ndlr : voir une dissertation sur la Constitution : une norme fondamentale]


[Lien avec le sujet] Le sujet s’intéresse donc à l’écart qui se crée entre le texte constitutionnel et la pratique qu’il en est fait. Il convient de rappeler que la Constitution est le texte fondamental, la norme suprême d’un régime politique. Elle fonde la nature du régime, définit ses institutions ainsi qu’elle organise ce qui va être la vie politique de l’État. De plus, certaines Constitutions sont porteuses de déclarations de droits qui font d’elles la gardienne des libertés individuelles, il en va ainsi par exemple pour la Constitution française de 1946 dont le préambule comporte une déclaration de droits.


Il s’agit ici, néanmoins, de se placer au regard d’une Constitution écrite et non d’une Constitution coutumière car, par principe, une Constitution coutumière ne pourra subir d’écart entre le texte constitutionnel et la pratique, étant elle-même formée par la pratique. Tout au plus, dans une Constitution coutumière, pourrait s’opérer un écart entre la coutume et la pratique mais cela reviendrait à faire évoluer la coutume et donc la Constitution.


La pratique est indissociable du texte de la Constitution car c’est par elle que la Constitution va s’appliquer, prendre vie. Il arrive que cette mise en pratique débouche une d’un décalage avec la théorie.


Dans l’histoire constitutionnelle, il existe de nombreux exemples où l’application de la Constitution a abouti à un écart plus ou moins conséquent entre théorie et pratique.

Ainsi, par exemple, la Constitution américain, qui date de 1787, a vu se produire un décalage en ce qui concerne les grands électeurs élus par les citoyens pour qu’ils élisent le président. En effet l’idée originelle de la Constitution prévoyait que ces grands électeurs, une fois élus au collège électoral, soient libres de leur choix, ce qui faisait dire à Alexander Hamilton dans le Fédéraliste

« que le mode d’élection est, sinon parfait, du moins excellent ».


Dans la pratique, les grands électeurs se sont de plus en plus senti tenus par un mandat impératif, déclarant à l’avance pour qui ils allaient voter. Certains États allant même jusqu’à promulguer des lois confirmant ce mandat impératif opérant alors un grand écart avec la Constitution.


Ce décalage peut s’observer dans à peu près tous les régimes ayant une Constitution écrite sous des formes et avec des répercussions d’importances variables. La IIIe République française (1875-1940) étant, sans doute, l’exemple le plus frappant d’écart entre la Constitution et la mise en pratique avec une application, mais surtout une certaine non-application, qui a changé de manière pérenne la physionomie du régime.


Une fois observé qu’un tel écart était assez fréquent, il est intéressant de considérer, comme l’y invite le sujet, s’il est impossible d’empêcher qu’un écart apparaisse entre la Constitution et sa mise en pratique. En effet, beaucoup de constituants ont sûrement espéré que le texte qu’il élaborait serait appliqué de façon pure et exacte, ce qui a, ensuite, été démenti par la pratique.


[Intérêts du sujet] Ce sujet mérite, donc tout son intérêt car les écarts entre pratique et théorie conduisent parfois à une application très éloignée de l’esprit du texte originel.


De ce fait, il est légitime de se poser la question de savoir si la pratique constitutionnelle produit immanquablement, par son simple fait, des écarts avec la Constitution ou bien s’il serait

possible d’appliquer une Constitution en respectant scrupuleusement le texte.


[Problématique] Une Constitution est-elle condamnée à subir un décalage lors de son application ? Une Constitution pourrait-elle résister à cet écart qui se crée par la pratique ?


Ce cas de figure, une Constitution appliquée littéralement, sans décalage avec la pratique, serait très appréciable pour le constituant qui verrait alors son œuvre gravée dans le marbre être exécutée de manière parfaite. Cependant cela est difficilement concevable, une Constitution n’étant pas parfaite et ne pouvant pas prévoir tous les cas de figure qui peuvent se produire au gré de la pratique constitutionnelle.


[Annonce de plan] Ainsi, la Constitution apparaît tout d’abord comme la formalisation de l’esprit du constituant, elle scelle une vision des choses qui n’est parfois pas facile de respecter dans la pratique (I) et de ce fait le décalage se crée par nécessité. Mais l’écart peut aussi être le signe de la vie de la Constitution, la preuve qu’elle n’est pas figée, qu’elle peut s’adapter sans disparaître (II), en effet une Constitution qui ne s’adapterait pas ne pourrait survivre à des pratiques différentes, elle serait remplacée.


 

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I - La Constitution, une formalisation de l’esprit du constituant parfois difficile à respecter


La Constitution apparaît comme le texte fondamental d’un régime politique qui a été rédigé dans un but précis d’organisation des institutions mais également avec un état d’esprit propre au constituant (A). Et ce texte est souvent amené à être interprété pour pallier l’absence de règles claires sur un point précis (B).


A. La Constitution, le fondement des institutions et de l’essence du régime politique


Une Constitution est un symbole fort, au-delà de son importance normative, elle se place au sommet de la hiérarchie des normes, elle est la garantie des droits fondamentaux individuels. Ces règles et droits sont fixés par le constituant originaire qui a à l’esprit une vision précise de ce qu’il veut voir appliqué.


Un constituant peut décider d’introduire, par exemple, dans la Constitution la théorie de la séparation des pouvoirs développée par Montesquieu dans son interprétation stricte comme ce fut le cas dans la constitution de l’an III avec une spécialisation extrême des organes, le Directoire étant confiné au pouvoir exécutif sans moyen de dialogue réel avec les Conseil de Cinq-Cents et des Anciens.


C’est le constituant qui fait les choix d’orientation de la nature du gouvernement, des institutions, c’est lui qui bâtit la théorie de l’application de la Constitution. Bertrand Mathieu définit la Constitution comme « un acte de souveraineté », elle est à un moment donné la volonté théorique du constituant souverain, que ce soit le peuple ou un monarque.


Cependant, la Constitution ne peut pas être omnisciente et apporter une réponse prédéfinie à toutes les situations qui se présentent aux gouvernants qui sont chargés d’assurer l’application du texte constitutionnel. L’interprétation de la Constitution prend alors tout son sens et peut amener à opérer un décalage dans les faits.



 

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B. L’interprétation du texte constitutionnel au service de la pratique institutionnelle


Il arrive fréquemment que les gouvernants se retrouvent face à une situation, un problème de droit qui n’a pas été envisagé dans le texte constitutionnel ; il leur faut alors interpréter la

Constitution en essayant de le faire dans l’esprit originel. Néanmoins, ils peuvent choisir sciemment de procéder à une interprétation erronée à des fins politiques. Napoléon disait qu’une Constitution devait être « courte et obscure » pour ainsi permettre une large interprétation au profit de la vision du gouvernant. Pour lui, la constitution ne devait pas gêner l’exercice du pouvoir.


Dans les institutions prévues par une Constitution, il arrive qu’un organe soit prévu pour assurer la bonne application de la Constitution et son respect par les gouvernants. Il en va ainsi des cours constitutionnelles qui ont vu le jour notamment au XIXe siècle en Europe, bien que cela existe depuis le XVIIIe aux États-Unis. C’est ainsi qu’en France le Conseil Constitutionnel fait œuvre d’interprétation de la Constitution. C’est par sa décision appelé « liberté d’association »

qu’en 1971 la Constitution de la Ve République s’est enrichie du préambule de la Constitution de 1946, de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789… en créant ainsi le bloc de constitutionnalité.


L’interprétation est donc une mise en pratique de la Constitution, sur des points où elle est muette en essayant de maintenir une cohérence avec le texte d’origine.


Pierre Avril parle lui de « conventions de la Constitution » qui s’établissent dans les silences laissés par la Constitution.


Si l’interprétation ne peut pas toujours respecter scrupuleusement la lettre de la constitution, il arrive également qu’au-delà d’une interprétation se développe des pratiques qui pourraient sembler contraires sinon à la lettre, du moins à l’esprit de la Constitution. Mais ces évolutions peuvent marquer que la Constitution est vivante et qu’elle change pour ne pas disparaître.


 
 

II - Le décalage opéré par la pratique synonyme de la vie de la Constitution


Un texte constitutionnel peut être très beau en théorie mais lors de son application il se trouve confronté à la réalité politique et humaine. Cela l’amène souvent à s’adapter (A). Il arrive aussi que la pratique soit tellement différente d’avec la théorie que la nature même du régime soit changée (B).


A. La confrontation avec la réalité politique, motif d’évolution de la pratique

La réalité politique et la pratique institutionnelle conduisent bien souvent à une adaptation de la Constitution. Cette réalité pouvait mener à une paralysie des mécanismes prévues par la Constitution. Ainsi, le droit de dissolution prévu par la Constitution de la IVe République n’a pu être exercé qu’une seule fois étant donné que les députés contournaient le mode de censure du gouvernement pour ne pas créer de crise ministérielle dans le cadre donné par la Constitution. Georges Vedel décrivant la situation comme une « hypocrisie monumentale » de la part des députés.

L’écart entre la Constitution et sa mise en pratique étant donc dû à la volonté humaine, à une action politique contournant les mécanismes constitutionnellement prévus.


Le décalage peut être fait dans un but de sauvegarde de la Constitution. En effet, une constitution pour laquelle aucun écart ne serait possible conduirait rapidement à un changement de constitution. De ce fait, les révisions de la constitution peuvent être la matérialisation du de l’écart opéré par la pratique. Elles permettent à la constitution de continuer à vivre car une constitution n’étant plus en adéquation avec son époque est vouée à être remplacée.


De Gaulle disait « qu’une constitution n’est bonne que pour un temps » et sans écart par la pratique le temps d’une constitution pourrait être très réduit. P-P Royer-Collard, quant à lui, rappelant que « la constitution n’est pas une tente dressée pour le sommeil », affirmait la nécessité de peaufiner la constitution par la pratique et il donnait ce rôle aux gouvernants.


La confrontation avec la réalité peut aussi amener la Constitution à être dans la pratique vidé de son sens et de son but premier.


 
 

B. La possibilité de la dénaturation de la Constitution par la pratique


L’écart entre la mise en pratique et la Constitution est parfois très frappant. Ainsi la IIIe République était à l’origine un régime où le président devait avoir des pouvoirs forts mais à cause d’un fait, en l’occurrence la crise ministérielle de 1877 suivie de la dissolution de la chambre des députés par le président Mac-Mahon, puis d’une coutume, la « constitution Grévy », le nature du régime s’est retrouvé bouleversé, l’exécutif devant le simple exécutant des assemblées. Le régime parlementaire dérivant en régime d’assemblée sans changement de constitution. [Ndlr : voir une dissertation détaillée sur le fonctionnement du régime parlementaire en France]


Des coutumes contra-legem peuvent aussi se former, par exemple dans la Constitution de la IVe République il est clairement disposé l’interdiction de recourir aux décrets-lois mais dans la pratique la loi Marie est un exemple du contournement de l'interdiction constitutionnelle. L’écart est donc ici très grand, la volonté des gouvernants pouvant très souvent passer outre le texte constitutionnel pour se diriger vers une pratique écartée de l’esprit initial.


 
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