Voici un corrigé détaillé d'un cas pratique en Droit des obligations contractuelles, portant sur l'offre avec délai et la promesse de vente (régime, violation). Majeure, mineure, points de méthodologie : la Team Pamplemousse vous explique tout !
Sommaire :
Sujet du cas pratique :
Emily et Gabriel vivent leurs meilleurs moments à Paris. Ils décident d’emménager ensemble et d’acheter un petit appartement dans le 3e arrondissement. Ils ont pris connaissance d’une annonce sur le site « Le bon endroit » : un petit 2 pièces à 200 000 euros. Ils sont surpris, mais très intéressés. Ils contactent l’auteur de l’annonce qui leur indique que le bien est encore à la vente et qu’ils peuvent le visiter.
Ils s’empressent de s’y rendre. Énorme coup de cœur. Ils le veulent, mais doivent voir avec leurs banquiers respectifs pour débloquer les fonds. « Pas de souci », leur indique Alfie, « je m’engage à vous le vendre si vous réunissez le financement. Je vous laisse 2 mois pour me confirmer votre volonté de vous porter acquéreurs ». Le mois qui suit, tout se débloque, les tourtereaux rappellent Alfie qui leur indique que le bien a été vendu à Sylvie et Luc.
Gabriel et Emily sont déçus, mais pensent qu’il ne pouvait pas le vendre à d’autres. Qu’en pensez-vous ?
[Qualification juridique des faits] Le propriétaire d’un immeuble le propose à la vente à 200 000 euros. Deux intéressés le visitent et le propriétaire s’engage à le leur vendre s’ils réunissent les fonds nécessaires dans un délai de deux mois.
Les bénéficiaires doivent lui confirmer leur volonté de se porter acquéreurs dans ledit délai, ce qu’ils font un mois avant la fin du délai imparti. Cependant, le propriétaire leur indique qu’il a vendu le bien à une tierce personne.
📚 Il n’est plus question de faire apparaître les noms des protagonistes. Seules les qualifications juridiques doivent apparaître. Pourquoi devez-vous qualifier juridiquement ? Pour éviter des confusions et être le plus exact possible. |
[Problématique] Les bénéficiaires peuvent-ils forcer la vente du bien à leur profit ?
[Annonce de plan] Après avoir rappelé les règles de droit applicables à l’espèce (I), il sera nécessaire de qualifier l’engagement (II) pour envisager les conséquences de sa violation (III).
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I/ Le droit applicable
[Majeure] Selon l’article 9 de l’ordonnance du 10 février 2016, ses dispositions s’appliquent aux contrats conclus à compter du 1er octobre 2016. Avant cette date, les contrats demeurent soumis au droit « ancien ». L’article 16 de la loi de ratification du 20 avril 2018 précise que ses dispositions s’appliquent aux contrats conclus à compter du 1er octobre 2018, sauf pour celles qui sont interprétatives.
📚 Pour encore plus de rigueur, il serait nécessaire d’ajouter que les dispositions expressément rétroactives s’appliquent aux contrats conclus avant les dates d’entrée en vigueur indiquée. Néanmoins, dans notre cas d’espèce, nous n’allons utiliser aucune de ces dispositions. Cependant, tu te dois d’aller vérifier, dans les articles qu’on vient de te donner, de quelles dispositions il s’agit, la loi et l’ordonnance les donnent. |
[Mineure] En l’espèce, aucune date n’est indiquée dans l’énoncé. Il est possible de considérer que les parties se sont rencontrées en 2023. L’acte a été conclu la même année.
📚 Ce qui compte, c’est la date de conclusion du contrat, pas celle du déroulé des faits ! Donc, précisez bien « le contrat/l’acte a été conclu ». On raisonne en ces termes. |
[Conclusion] Par conséquent, le droit applicable est celui actuellement en vigueur, dans sa rédaction issue de la loi de ratification du 20 avril 2018.
II/ La qualification de l’acte
[Majeure] L’article 1114 du Code civil dispose que l’offre est faite à une personne déterminée ou indéterminée. Elle comprend les éléments essentiels du contrat envisagé et exprime la volonté de son auteur d'être lié en cas d'acceptation. À défaut, il y a seulement invitation à entrer en négociation. L’offre peut être faite avec délai (art. 1116 al. 1 du Code civil).
L’article 1583 du Code civil dispose qu’en matière de vente les éléments essentiels du contrat sont la chose et le prix.
L’article 1123 al. 1 du Code civil définit le pacte de préférence comme le contrat par lequel une partie s'engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle déciderait de contracter.
L’article 1124 al. 1 du Code civil dispose que la promesse unilatérale est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l'autre, le bénéficiaire, le droit d'opter pour la conclusion d'un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire.
📚 Pour une meilleure intelligibilité, vous pouvez faire une majeure par mineure (dans notre exemple, vous commencez par le pacte de préférence, puis l'offre, pour finir par la promesse). Nous vous avons découpé les mineures, mais proposé une majeure générale. Néanmoins, de votre côté, pour être sûr de n’oublier aucune condition dans vos mineures, on vous conseille vivement de découper votre majeure. |
[Mineure 1. L’exclusion du pacte de préférence] En l’espèce, le vendeur ne s’est jamais engagé à proposer prioritairement son bien aux acheteurs. Il s’est engagé à le vendre sous condition de l’obtention d’un prêt. Il y avait un véritable engagement et pas seulement un droit de préférence.
[Conclusion] Par conséquent, l’acte ne peut pas être qualifié de pacte de préférence.
[Mineure 2. L’existence d’une offre avec délai] En l’espèce, les éléments essentiels sont déterminés : le bien et le prix. Il y a un délai qui est octroyé aux acheteurs pour réunir les fonds. Le vendeur semble donc déterminé à être lié si ces derniers acceptent dans le délai imparti.
[Conclusion] Par conséquent, il ne s’agit pas d’une simple invitation à entrer en pourparlers. Il serait possible de considérer qu’il s’agit d’une offre avec délai faite à personne déterminée.
[Mineure 2. L’existence d’une promesse de vente] L’offrant s’est engagé fermement auprès des bénéficiaires leur indiquant que s’ils réunissaient les fonds et acceptaient dans un délai de deux mois, il leur vendait le bien. Il leur a laissé un délai d’option, les acheteurs ne sont pas engagés tant qu’ils ne le lèvent pas. En revanche, le promettant est engagé.
[Conclusion] Par conséquent, il est possible de considérer qu’il s’agit d’une promesse de vente.
📚 Ici, vous avez le choix entre offre et promesse. Vous allez devoir établir les conséquences de la violation des deux actes. Néanmoins, au niveau des conséquences, la qualification en promesse est bien plus avantageuse pour les parties : ils peuvent imposer la conclusion du contrat, ce qui n’est pas envisageable pour une simple offre. L’objectif est toujours de défendre au mieux votre client, ici les bénéficiaires. ⚠️ Il faut démontrer que le tiers avait connaissance de l’existence de la promesse. Si votre client était le vendeur, il est plus intéressant d’aller sur le terrain d’une offre dont la violation emporte des conséquences moins importantes. |
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III/ La violation de l’acte
[Majeure] Selon l’article 1116 du Code civil, l’offre avec délai ne peut être rétractée. Néanmoins, si elle est rétractée, le contrat ne peut pas être conclu. Cette situation ne permet que l’engagement de la responsabilité extracontractuelle du pollicitant.
📚 Pour être au top niveau de la rigueur, vous devez citer ici l’article 1240 du Code civil qui prévoit le régime de cette responsabilité. |
L’article 1124 al. 2 et 3 du Code civil dispose que la révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat promis.
Le contrat conclu en violation de la promesse unilatérale avec un tiers qui en connaissait l'existence est nul.
[Mineure 1. La violation d’une offre avec délai] En l’espèce, le vendeur a conclu une vente avec une tierce personne, alors que le délai imparti aux premiers acheteurs n’était pas écoulé. Il est possible d’observer une révocation de l’offre.
[Conclusion] Par conséquent, le vendeur a révoqué son offre avant l’expiration du délai.
[Mineure 2. La violation d’une promesse] En l’espèce, le temps laissé aux bénéficiaires n’était pas écoulé. Ils ont levé l’option dans les délais, mais un contrat avait déjà été conclu avec une tierce personne. Rien n’indique néanmoins si cette dernière avait connaissance de l’existence de cet acte entre les parties.
[Conclusion] La promesse a été révoquée dans le temps laissé au bénéficiaire et violée par la formation d’un contrat avec un tiers. Si ce dernier avait connaissance de son existence, les parties pourront demander la nullité de la vente.
[Conclusion générale] En considérant que l’acte serait une simple offre avec délai, les premiers acheteurs ne pourraient pas forcer la conclusion du contrat. Cette dernière permet d’obtenir des dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle.
A contrario, en préférant qualifier l’acte de promesse unilatérale, ce qui est, en l’espèce, envisageable, les bénéficiaires pourraient invoquer la nullité du contrat passé avec la tierce personne en violation de la promesse, s’ils démontrent qu’elle en connaissait l’existence. Il pourrait ensuite invoquer la formation du contrat promis et ainsi obtenir le bien convoité.
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