Voici un commentaire d'arrêt de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation, le 3 mai 1989, pourvoi n°87-19.125 en droit des contrats civils et commerciaux, qui a obtenu une note de 15/20. Il y sera traité l’indétermination du prix étant une sanction sévère puis une jurisprudence stricte et évolutive.
Sommaire
N.B.: Cette copie est le fruit de la réflexion d’un étudiant en droit. La découvrir vous permettra de comprendre le raisonnement de ce dernier, qui lui a valu la note indiquée. Elle vous aidera à ce que vous ayez les outils pour formuler votre propre réflexion autour du sujet donné. Pour rappel, le plagiat est formellement interdit et n’est évidemment pas recommandé si vous voulez vous former au droit. En d’autres termes, réfléchissez vous-même ! Enfin, cette copie n’a pas eu 20/20, gardez un œil critique sur ce travail qui n’est donc pas parfait.
Disclaimer : attention ! N’oubliez pas que selon les facultés et les enseignants, l’approche méthodologique peut varier. La méthodologie utilisée dans cette copie n'est donc pas universelle. Respectez la méthodologie enseignée par vos chargés de travaux dirigés et par vos enseignants 😊.
[Accroche] La troisième chambre civile de la Cour de cassation, le 3 mai 1989, pourvoi n°87-19.125 rend un arrêt inédit annulant une promesse synallagmatique de vente pour indétermination du prix lorsque celui-ci est soumis à l’évaluation d’un tiers.
[Faits] Des époux, ont consenti une promesse synallagmatique de vente et y ont inséré une clause de dédit. La fixation du prix étant indéterminé dans la promesse synallagmatique de vente, il est inséré dans le contrat que les parties auront recours à des experts pour déterminer ce dernier.
[Procédure] La Cour d’appel de Montpellier, le 9 septembre 1987 a constaté la nullité de la promesse synallagmatique de vente et a rejeté la demande de dommages et intérêts demandé par l’un des co-contractants au motif que le prix est indéterminé et que cela entraîne la nullité de la vente.
[Moyens] Les requérants se pourvoit en cassation au motif que le recours à des experts pour fixer le prix de vente étant légal, le juge devait faire application de cette clause. De plus, le prix étant déterminable le contrat ne pouvait être déclaré nul. Ainsi, que la nullité de la promesse de vente entraîne celle de la clause de dédit qui y était insérée.
[Problème de droit] La détermination du prix peut-elle être soumise à l’évaluation de plusieurs experts lorsque les contractants n’ont pas déterminé dans le contrat le moyen de départager les différents experts en cas d’évaluations différentes ?
[Solution] La troisième chambre civile de Cour de cassation, dans son arrêt du 3 mai 1989, rejette le pourvoi au motif que les contractants n’avaient pas prévus dans leur contrat un moyen de départager les techniciens en cas de divergences, et qu’ainsi le contrat était imparfait. La Cour de cassation déclare le contrait nul pour indétermination du prix, ce qui engendre que les acquéreurs ne peuvent pas se prévaloir de la clause de dédit insérée à l’acte.
[Annonce de plan] Les juges sanctionnèrent l’indétermination du prix par la nullité du contrat de vente (I), c’est donc une application stricte de la loi. Cette jurisprudence peut ainsi être qualifié de sévère, mais en l’espèce cette décision est à part des tendances jurisprudentielles (II).
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I - L’indétermination du prix : une sanction sévère
Lorsque le prix n’est pas précisé dans l’avant-contrat de vente, celui-ci encoure par principe la nullité absolue (A), mais par exception, les parties peuvent décider de s’en remettre à l’arbitrage d’un tiers pour déterminer le prix (B).
A. La nullité absolue comme sanction de l’indétermination du prix
La Cour d’Appel a rendu sa décision au visa de l’article 1589 qui dispose que : « La promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix. Si cette promesse s'applique à des terrains déjà lotis ou à lotir, son acceptation et la convention qui en résultera s'établiront par le paiement d'un acompte sur le prix, quel que soit le nom donné à cet acompte, et par la prise de possession du terrain. La date de la convention, même régularisée ultérieurement, sera celle du versement du premier acompte. », et de l’article 1591 du Code civil qui précise que « Le prix de la vente doit être déterminé et désigné par les parties. ». Le principe est que le prix soit inscrit dans un contrat de vente pour qu’il soit valide. Ainsi, ces articles du Code civil énoncent que le prix doit résulter d’un accord entre le vendeur et l’acquéreur. Si ce prix est déterminé unilatéralement par l’une des parties le contrat est nul.
Les contractants ont inséré une clause de dédit dans la promesse synallagmatique de vente, qui autorise les acquéreurs à se délier de leur engagement en contrepartie du versement d’une somme d’argent définie préalablement. Ainsi, le prix n’étant pas déterminé préalablement, les vendeurs en insérant cette clause permettent aux acquéreurs de ne pas conclure l’acte authentique de vente.
La Cour de cassation énonce que « cette nullité ne permettant pas aux acquéreurs de se prévaloir de la clause de dédit insérée à l'acte ». Ainsi, la nullité de l’acte, entraîne la nullité de la clause de dédit insérée dans l’acte.
Mais la chambre des requêtes, dans un arrêt du 7 janvier 1025, indique qu’il n’est pas nécessaire que le prix soit déterminé et que le montant soit fixé, il suffit que le prix puisse être déterminé en vertu des clauses du contrat par voie de relation avec des évènements ne dépendant pas de la volonté de l’une ou l’autre des parties. Les requérants reprennent dans leur deuxième argument cette même formulation. Ainsi, la jurisprudence antérieure à la condition que le prix soit déterminable selon une méthode précisée par le contrat, sur la base d’éléments extérieurs à la volonté des parties estime le contrat valide.
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B. L’absence de précision concernant le recours à l’arbitrage d’un tiers
L’article 1592 du Code civil énonce que : « Il peut cependant être laissé à l'arbitrage d'un tiers ; si le tiers ne veut ou ne peut faire l'estimation, il n'y a point de vente. ». En effet, dans la promesse synallagmatique de vente la prix n’étant pas déterminé par les parties, il est inscrit « qu’à défaut d’accord amiable « un prix … sera fixé… par experts choisis entre les parties » ». Ainsi, il s’agit d’une exception à l’article 1591 du Code civil, laissant l’estimation du prix à un tiers. Les parties doivent dans ce cas, convenir dans le contrat des modalités de désignation du tiers chargé de fixer le prix définitif du bien.
La chambre commerciale de la Cour de cassation le 10 mars 1987 précise que lorsque le prix est seulement déterminable, la jurisprudence exige que sa fixation soit indépendante de la volonté des parties. C’est dans ce sens que les parties ont recours à l’arbitrage d’un tiers pour fixer un prix.
La Cour de cassation précise que « les contractants ne s'en étaient pas remis à l'arbitrage d'un tiers, que si chacun s'était réservé en cas de contestation sur le prix, de recourir à un expert de son choix, il n'avait été prévu à leur convention aucun moyen propre à départager les techniciens en cas de divergences entre eux ». La Cour de cassation remet donc en cause le régime de détermination du prix prévu par les parties.
Ainsi, la Cour de cassation dans cet arrêt, décide d’annuler une promesse synallagmatique de vente par manque de précision dans la clause remettant la détermination du prix à l’arbitrage d’un tiers. Malgré la précision des contractants dans les motifs de leur pourvoi aux experts, de procéder à une « expertise commune ».
La Cour de cassation, reprend la lettre de l’article 1592 du Code civil, et laisse sous-entendre par sa décision, que celle-ci aurait pu être différente, si un seul expert avait été communément désigné par les parties et nommément désigné dans l’acte.
Il est nécessaire de préciser que malgré que la Cour de cassation qui souhaite protéger les parties au contrat d’un éventuel désaccord pour départager les techniciens en cas de divergence, le mandataire désigné par les parties doit être loyal et indépendant.
D’après l’arrêt de la chambre commerciale, du 4 février 2004, le prix que le tiers a fixé à l’issue des opérations d’expertise s’impose aux parties qui ne peuvent le contester, sauf erreur grossière de sa part.
II - Une jurisprudence stricte et évolutive
La volonté des parties dans un contrat de vente s’impose au juge (A), se dernier ne peut modifier le prix. Cet arrêt se trouve dans la tendance jurisprudentielle qui évolue et qui s’est stabilisé par la réforme du droit des contrats en 2016 (B).
A. L’impossible modification du contrat par le juge
La Cour de cassation dans sa solution met en avant « que l'imperfection du contrat qui ne pouvait être réparée par la décision du juge entraînait sa nullité pour indéterminabilité du prix ».
En vertu de l’article 1134 ancien du Code civil qui dispose que « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. » et l’article 1135 ancien du Code civil qui précise que « Les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature. », le juge est tenu de respecter la volonté des parties.
Ainsi, lorsque le juge estime le contrat imparfait, et découvre une cause de nullité, telle qu’ici, l’indétermination du prix, comme il ne peut pas changer la clause, il doit respecter la volonté des parties, il peut alors annuler le contrat.
En termes de droit des obligations, concernant les avants-contrats de vente le juge peut, annuler un contrat lorsque que la loi l’y autorise, ou accorder des dommages et intérêts dans certaines circonstances. De plus, il peut d’après la jurisprudence plus récente, forcer l’exécution du contrat.
D’après la première chambre civile de la Cour de cassation le 24 février 1998, le juge ne peut pas se référer à des éléments extérieurs pour fixer le prix car cela reviendrait à une fixation judiciaire du prix. De même, d’après un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation, rendu le 10 mars 2015, le juge ne peut pas moduler le prix de vente, lorsqu’il ne correspond pas aux spécifications du contrat, il peut seulement octroyer des dommages et intérêt.
Ici, le juge décide d’annuler le contrat de vente, pour indétermination du prix, et cela engendrant le fait que les acquéreurs ne pourront pas « se prévaloir de la clause de dédit insérée à l'acte », celle-ci ayant été insérée, si le prix définit par les experts ne leur convenait pas.
Les juges ont été préventifs, en choisissant de recourir à la nullité de la vente. Ils se sont initiés entre les parties au motif qu’« il n'avait été prévu à leur convention aucun moyen propre à départager les techniciens en cas de divergences entre eux ». En effet, les juges ne pouvant plus intervenir lorsque le prix est fixé, l’annulation de la promesse synallagmatique de vente semble être le seul moyen pour les juges de protéger les parties au contrat.
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B. Une jurisprudence évolutive en quête d’une stabilité
Depuis le début des années 1970, la jurisprudence a de nombreuses fois, recouru à la sanction sévère qu’est la nullité, en appliquant strictement l’article 1591 du Code civil, et en précisant que le prix de dépendait pas de la volonté des parties.
Cette position de la Cour de cassation a fait l’objet de nombreuses critiques de la part de la doctrine, c’est pourquoi la Cour de cassation dans son arrêt du 9 mars 1987 précise que seuls les contrats soumis à une obligation de donner sont soumis à l’exigence de détermination du prix.
Les requérants énoncent une jurisprudence antérieure du 22 mai 1978 permet de penser qu’il s’agit d’une fluctuation de la jurisprudence.
L’arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 3 mai 1989, s’inscrit dans la tendance sévère du fait de l’annulation pour indétermination du prix.
Mais, par quatre arrêts en date du 1e décembre 1995, l’assemblée plénière de la Cour de cassation énonce que « lorsqu’une convention prévoit la conclusion de contrats ultérieurs, l’indétermination du prix de ces contrats dans la convention initiale n’affecte pas, sauf dispositions légales particulières, la validité de celle-ci, l’abus dans la fixation du prix ne donnant lieu qu’à résiliation ou indemnisation ». La Cour de cassation sanctionne alors l’abus dans la fixation du prix par la résiliation du contrat ou l’octroi de dommages et intérêts.
Enfin le législateur est intervenu par une ordonnance du 10 février 2016, précisant dans son article 1223 du Code civil qu’ « En cas d'exécution imparfaite de la prestation, le créancier peut, après mise en demeure et s'il n'a pas encore payé tout ou partie de la prestation, notifier dans les meilleurs délais au débiteur sa décision d'en réduire de manière proportionnelle le prix.
L'acceptation par le débiteur de la décision de réduction de prix du créancier doit être rédigée par écrit. Si le créancier a déjà payé, à défaut d'accord entre les parties, il peut demander au juge la réduction de prix » ; et dans l’article 1163 du Code civil précisant que : « L'obligation a pour objet une prestation présente ou future. Celle-ci doit être possible et déterminée ou déterminable. La prestation est déterminable lorsqu'elle peut être déduite du contrat ou par référence aux usages ou aux relations antérieures des parties, sans qu'un nouvel accord des parties soit nécessaire. »
Nous pouvons donc légitimement nous demander, si la même solution serait rendue aujourd’hui.
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