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[CAS PRATIQUE] La conclusion du contrat de société


Voici un exemple de cas pratique en droit commun des sociétés portant sur l’objet social, les modalités d’apport, la reprise des actes, les clauses léonines et la durée de vie de la société. Cette copie a obtenu la note de 15/20.

 

Sommaire :


 
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N.B. : cette copie est le fruit de la réflexion d’un étudiant en droit. La découvrir vous permettra de comprendre le raisonnement de ce dernier, qui lui a valu la note indiquée. Elle vous aidera à ce que vous ayez les outils pour formuler votre propre réflexion autour du sujet donné. Pour rappel, le plagiat est formellement interdit et n’est évidemment pas recommandé si vous voulez vous former au droit. En d’autres termes, réfléchissez vous-même ! Enfin, cette copie n’a pas eu 20/20, gardez un œil critique sur ce travail qui n’est donc pas parfait.


Disclaimer : attention ! N’oubliez pas que la méthodologie peut varier selon les facultés, mais aussi en fonction des enseignants. La méthodologie utilisée dans cette copie n'est donc pas universelle. Respectez la méthodologie enseignée par vos chargés de travaux dirigés et par vos enseignants 😊.


Nous avons laissé en orange les commentaires du correcteur.


 

Sujet du cas pratique :


Vous êtes stagiaire au sein d’un cabinet d’avocat et vous recevez un mail de votre directeur de stage : il n’a pas le temps de s’occuper d’un de ses clients. Il attend de vous que vous lui répondiez avec clarté et que vous lui rappeliez les règles applicables en un raisonnement clair et concis des éléments de réponses. Voici le mail :


« Maître,


Mes amis Natacha, Steve, Bruce, Clint et moi-même avons pour projet de créer une société. Voici quelques éléments de synthèses de nos échanges :


- Bruce et moi ne sommes pas forcément d’accord sur l’objet de la société. Bruce veut faire avancer la science alors que moi je ne recherche que le profit, quitte à franchir quelques limites. Mais cela n’est pas un problème, n’est-ce pas ? Et au pire, nous verrons cette question de l’objet plus tard.


- Natacha n’est pas souvent présente et disponible. Elle n’a pas beaucoup de moyens financiers. Pour autant, c’est un élément important de notre équipe, ce n’est donc pas un problème pour nous (Clint a même proposé de payer son capital à sa place). Nous voulions qu’elle soit associée et si besoin, elle signera les statuts plus tard lors de sa prochaine venue après la création de la société.


- Clint a énormément œuvré ces dernières semaines pour notre équipe. Il a trouvé notre logo et a acheté nos tenues communes. Cela m’embête un peu, car je souhaiterai que cela appartienne à la future société mais nous n’avions pas échangé sur ce point en amont, et il a œuvré seul de son côté.


- Enfin, je dois vous avouer qu’il existe quelques tensions entre Steve et moi. Il serait prêt à accepter qu’il ne touche aucun bénéfice de notre société pendant toute la durée de la société (à ce sujet, la société devra avoir une durée illimitée), si en échange je m’engage à payer toutes les dépenses auxquelles la société ne pourrait faire face.


Je vous remercie de nous faire part de vos observations.


Cordialement,


Tony S. »


 
 

Selon l’article 1832 du Code civil, la société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d’affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou l’économie qui pourra en résulter.


Il existe trois conditions essentielles pour la conclusion du contrat de société : la réalisation d’apports, l’intention des associés de participer aux résultats de la vie sociale, et l’affectio societatis. « Fondement juridique ? Il faut donner la jurisprudence. »


L’étape de la formation de la société est une période avec de nombreux enjeux : déterminer l’objet social, les modalités d’apports et la forme sociale.


[Qualification juridique des faits] En l’espèce, 5 jeunes (« le mot "jeunes" n'est pas une qualification juridique ») s’interrogent sur un projet de société en commun. Tout d’abord, ils ne sont pas du même avis sur l’objet social de la société et décident qu’ils pourront choisir plus tard.

De plus, Natacha (« Qualification juridique? Et même chose pour le reste du devoir. Qualifier juridiquement permet de savoir de quel régime juridique il va s'agir. Les prénoms doivent, en principe, disparaitre. ») n’est pas souvent présente et n’a pas les moyens d’investir. Toutefois, elle est une personne clé du projet.

Clint a également trouvé lui-même le logo, et acheté les tenues mais Tony, le client, voudrait que cela appartienne à la société.


Enfin, Tony a des désaccords avec Steve qui serait prêt à renoncer à tous les bénéfices de la société si Tony s’engage à payer entièrement les dettes de celle-ci.

Il faut également noter que Tony voudrait que la société soit à durée illimitée.


[Problématiques] Il convient de se demander si l’objet social peut être défini vaguement dans les statuts de la société, ou s’il doit faire l’objet d’une qualification précise ? « Bien ! »

Ensuite, comment une associée (« Par souci de cohérence, il aurait bien fallu la qualifier ainsi ci-dessus. Cf autres remarques. ») sans moyens financiers peut-elle devenir associée ?

De plus, existe-t-il un moyen pour qu’un associé ayant réalisé des achats avant la formation de la société puisse les mettre au nom de la société ? « Très bien ! »


Enfin, un associé peut-il renoncer aux bénéfices de la société, et un autre peut-il s’engager à payer toutes les dettes ? Une société peut-elle avoir une durée de vie illimitée ? « Très bien ! »


[Annonce de plan] Afin de répondre à ces problématiques, il faudra aborder les particularités de l’objet social (I), les modalités d’apport (II), la reprise des actes (III), et enfin les clauses léonines et la durée de vie de la société (IV).



I/ Sur l’objet social et l’exigence de l’affectio societatis


[Majeure] Depuis le célèbre arrêt Marleasing rendu par la Cour de justice de l’Union Européenne en date du 13 novembre 1990, le juge contrôle seulement la licéité de l’objet statutaire pour apprécier la licéité de l’objet social.


Si celui-ci est illicite, ou même contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs, le juge peut prononcer la nullité de la société.

L’article 1833 du Code civil exige que cet objet soit licite et selon l’intérêt commun de la société. Cet article a été illustré dans un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation, le 6 mai 1991.


En effet, cet objet social permet de limiter les pouvoirs du dirigeant. La société étant une personne morale, elle a une capacité restreinte, le dirigeant ne pouvant agir alors qu’en faveur de l’objet social et dans son but.

Il convient également de prêter attention à la distinction de l’objet civil ou commercial : une société civile ayant donc un objet social civil, ne pourra exercer d’activités commerciales sous peine de nullité. « Fondement juridique ? »


De plus, selon l’article 1835 du Code civil, les statuts ont des mentions obligatoires, parmi lesquelles figure l’objet social. Cet objet social doit donc être déterminé préalablement à la rédaction des statuts, au tout début donc de l’aventure sociale.


Il découle de l’article 1832 du Code civil, que les associés collaborent de façon effective à l’intérêt commun. Cette collaboration se traduit alors par la nécessité d’un affectio societatis. Cette notion est apparue dans un arrêt du 3 juin 1986, rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation. « Pourquoi parler de l'affectio societatis dans une sous-division relative à l'objet social ? »


[Mineure] En l’espèce, il n’est donc pas possible (« Attention, vous concluez trop vite, il faut d'abord procéder à la démonstration qui vous amène à cette conclusion. ») pour les associés de choisir l’objet social postérieurement à la rédaction des statuts (« Pourquoi ??! Il faut l'établir. Vous donnez une conclusion sans confronter faits et majeure »). De plus, l’objet social étant le but de la société, il est nécessaire que les futurs associés se mettent d’accord sur ce dernier. « OK ! »

Il leur est également conseillé de choisir un objet commercial. En effet, ils pourront alors exercer une activité civile : aider la science, et une activité commerciale : faire du profit. « Pas clair... Ils devraient choisir une société à forme commerciale, plutôt ? »


Enfin, il est nécessaire de les mettre en garde sur l’exigence d’un affectio societatis. Ils doivent alors se mettre d’accord sur le but de la société, sous peine d’entraîner la nullité du contrat sociétal. « Mais quel rapport avec l'affectio societatis ? Et vous n'êtes pas suffisamment précise. »


 
 

II/ Sur les modalités d’apports


A) Sur la possibilité d’apports en numéraire


[Majeure] L’apport est une condition essentielle au contrat de société, c’est une opération visant à mettre à disposition de la société une certaine valeur, en échange de la qualité d’associé. Il est consacré à l’article 1843-3 du Code civil.


L’article 1843-2 du Code civil dispose que les droits de chaque associé dans le capital social sont proportionnels à ses apports.


Selon la jurisprudence (« Laquelle ? Précisez. ») de la Cour de cassation, peu importe les modalités de paiement de l’apport d’un associé, tant qu’il est écrit dans les statuts, l’associé acquiert la qualité d’associé.

Ainsi, si un associé se fait prêter de l’argent pour payer l’apport, il est associé en son nom propre ( « Oui, sauf hypothèse spécifique de simulation, etc. »).

[Mineure] En l’espèce, Natacha (« Il faut conserver les mêmes qualifications que dans les pbq par souci de cohérence... ») peut donc se faire prêter de l’argent par son ami Clint, pour réaliser l’apport au capital social. Elle acquerra la qualité d’associée, et sera tenue personnellement de rembourser son prêt à son ami. « Oui, mais vous n'êtes plus sur notre sujet, et à la limite, dites en quoi / pourquoi / fondez juridiquement. »

Clint ne peut cependant pas réaliser directement l’apport dans le capital social, puisqu’il acquerra les droits résultant de cet apport, en plus des droits qu’il a acquis pour son apport personnel. « Pas clair. Pourquoi ne le peut-il pas ? Il faut établir le lien entre la majeure et votre conclusion. »

De plus, si Natacha signe après la création de la société, elle n’aura pas la qualité de fondatrice mais seulement d’associée. « OK fondement ? Soyez précise et qualifiez juridiquement. Il aurait été intéressant d'évoquer les modalités de libération des apports pour renseigner vos clients jusqu'au bout. »


 
 

B) Sur la possibilité d’apports en industrie


Dans le projet, il est dit que Natacha est un pilier de la société. Si elle est aussi essentielle pour la société, cela peut être pour son intelligence, son savoir-faire ou même sa notoriété. Elle pourrait donc réaliser un apport en industrie. « Bien. »


[Majeure] Ce type d’apport est consacré à l’article 1843-2 du Code civil. En contrepartie de son industrie, l’apporteur reçoit des parts sociales lui conférant des droits sociaux.


Cet apport ne concourt cependant pas à la formation du capital social. Il ne peut donc être saisi par les créanciers. La part du bénéfice de l’apporteur en industrie est alors égale à celle de l’associé qui a le moins apporté, comme juste équilibre au faible risque que prend l’apporteur.


Certaines obligations découlent toutefois de cet apport, comme celle d’effectuer la prestation ainsi qu’une obligation de non-concurrence. Mais l’apporteur en industrie a également une obligation de contribuer aux pertes et il est soumis à une dette d’apport.


En effet, l’apporteur en industrie n’étant pas soumis à une exclusivité, il doit en revanche reverser à l’entreprise toutes ses rémunérations résultant de l’activité objet de l’apport.


« Quid des sociétés dans lesquelles cet apport est interdit (SA, art. L. 225-3 et commandités pour SCS et SCA, v. art. L. 222-1 s. et L. 226-1 s. du Code de commerce) ? »


[Mineure] En l’espèce, Natacha pourrait peut-être envisager un apport en industrie si une compétence lui permet d’être essentielle au projet. « Il faut être bien plus précise. Il manque bcp trop d'éléments. C'est sommaire. »


[Conclusion] Elle aurait alors la qualité d’associée et obtiendrait des droits sociauxÀ quelle hauteur ? Votre mineure est trop sommaire vous oubliez de nombreuses informations essentielles !! »), mais elle devra se dégager du temps libre. Elle n’aurait toutefois pas à emprunter une grosse somme pour être associée.


Elle peut également réaliser un apport en nature si elle possède un bien pouvant intéresser la société comme un bien immobilier ou mobilier, corporel ou incorporel. « OK mais quel rapport ? Vous récitez des connaissances qui n'apportent rien à votre raisonnement. Attention, car vous perdez en clarté. »



III/ Sur la reprise des actes


[Majeure] Selon les dispositions de l’article 1843 du Code civil, les futurs associés peuvent conclure des actes au nom de la société en formation. « Et les autres articles ? L. 210-6 C. com. ? R. 210-6 ? Art. 6 du décret de 1978 ? »

En effet, la société acquiert sa personnalité juridique au moment de l’immatriculation, mais les associés peuvent conclure des actes sur des éléments essentiels de la société, qui les reprendra aux associés. L’acte doit cependant être de nature contractuelle. La société doit également avoir été immatriculée, et il y a une obligation d’information des cocontractants : l’associé contractant devant dire qu’il agit au nom de la société.

5 etapes fondamentales reussir cas pratique

Cette reprise se fait valablement soit par annexion des états des actes lors de la signature des statuts, soit au moyen d’un mandat précis spécial et déterminé ») émis par la société, soit à défaut de mandat ou d’annexion aux statuts, il est prévu un moyen de reprendre les actes par la décision unanime de l’assemblée générale de la société.


Attention toutefois, la Cour de cassation étant très exigeante sur ces formalités, elle n’acceptera pas le mandat tacite. « Oui, donnez la jurisprudence. »


[Mineure] En l’espèce, Clint a œuvré seul, donc sans mandat. S’il a conclu la vente des tenues en disant qu’il oeuvrait pour la société, et que les statuts ne sont pas rédigés, il peut annexer l’acte de vente aux statuts dès qu’ils seront rédigés. Ainsi, cela entrainera une reprise automatique au jour de l’immatriculation. « Très bien »


Sinon, une décision unanime de l’assemblée générale pourra permettre une reprise. Dans l’hypothèse où un seul des associés ne serait pas d’accord, ce qui ferait obstacle à la décision unanime,S'il est associé... ») Clint pourra toujours décider de faire un apport en nature pour apporter le logo et les tenues à la société en échange de droits sociaux.OK mais quel lien avec la reprise ? »)


 
 

IV/ Sur les clauses léonines et la durée de vie sociale


« Je ne comprends pas pourquoi ils sont étudiés ensemble ? »


A) Les clauses léonines


[Majeure] L’article 1844-1 du Code civil prohibe les clauses léonines dans le contrat de société. Celles-ci représentent l’exclusion totale d’un associé des bénéfices, ou à l’inverse, l’excluant totalement des pertes, ou encore en affectant la totalité des pertes ou des bénéfices à un associé.

La sanction de ces clauses léonines est de les déclarer non écrites par le juge.. Ces dispositions s’appliquent dans les statuts mais également dans les actes postérieurs comme a pu le juger la Cour d’appel de Paris dans un arrêt rendu le 5 décembre 1983.


[Mineure] En l’espèce, la clause permettant à Steve (« qualification, de même pour Tony ») de ne pas recevoir de bénéfices, et imputant toutes les pertes de la société à Tony est une clause léonine (« Dites pourquoi »).

[Conclusion] Leur arrangement est donc prohibé en droit positif et cette clause sera réputée non écrite, chaque associé devant contribuer aux pertes mais également recevoir des bénéfices. « OK ! »


B) Sur la durée de vie de la société


[Majeure] Selon l’article 1838 du Code civil, la durée maximum d’une société est de 99 ans. La durée de vie sociale doit être prévue par les statuts, mais elle peut toutefois être inférieure au maximum imposé. Cette limite permet d’éviter qu’un associé se retrouve bloqué indéfiniment dans une société. « Oui ! »

Cependant, la société peut être prorogée avant la fin du délai prévu par les statuts, et donc excéder la durée maximum de 99 ans. En revanche, une fois ce délai expiré et non renouvelé, la société est dissoute.


[Mineure] En l’espèce, le client ne peut pas prévoir une durée illimitée pour la société. Il pourra au maximum prévoir une durée de 99 ans maximum dans les statuts, qui pourra être prorogée. Il ne devra cependant pas oublier de la renouveler avant l’expiration du terme, sous peine de voir sa société dissoute.


Elise TADDEI


 
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